Nos griffons dans les Highlands - septembre 2019
La chasse au chien d’arrêt procure une émotion esthétique intense aussi bien par les péripéties de la chasse, la beauté des allures et du style d’arrêt du chien, la beauté et la sauvagerie de l’oiseau chassé que par le cadre où elle s’exerce. L’Ecosse, et plus précisément les Highlands, est sous cet angle, un pays béni pour l’utilisation du chien d’arrêt. Un paysage de landes, de bruyères et de tourbières, Le moor, épousant les ondulations du sol s’étend à l’infini, balayé par le vent et les rafales de pluie.

Le travail demandé aux chiens est difficile, le terrain étant montagneux, moyennement escarpé – sans doute moins que dans les Alpes ou les Pyrénées mais exigeant pourtant un grand travail des chiens qui quêtent en montant et en descendant les flancs de montagne.

Pour Patrick Morel – Pointer club français, 2ème sem. 2019 p.15 –le setter anglais et le pointer anglais sont les deux races principalement utilisées.

Les griffons du Ruisseau de Rossignol que je sélectionne pour la chasse de haut niveau depuis 9 générations seraient-ils capables de se mesurer à ces chiens britanniques ? C’est une question qui tourne en boucle dans ma tête notamment depuis ma lecture de l’ouvrage  de William Arkwright « Le pointer » p. 197-198 : « Sur les moors… vous voyez la nature d’un pointer dans toute son excellence ; avec un espace que ses plus ambitieux désirs peuvent à peine parcourir, avec la facilité de prendre le vent… il n’est plus limité d’un coté par une haie… Les premières sorties sur les moors sont ce qui induira le plus un chien à oublier immédiatement les lois de la disciple qu’on lui a déjà enseignées… J’ai vu beaucoup de bons chiens quoiqu’ils n’aient jamais travaillé de gibier plus difficile que les perdrix ; mais je n’en ai jamais rencontré un digne du titre de remarquable qui n’ait eu à élargir ses facultés dans les moors. »

 


Ce désir d’affronter ces moors me travaillant, j’en parle à mon épouse qui m’encourage à tenter ce pari énorme avec mon ami Eric immédiatement séduit par le projet.

Définition exacte du projet, dates retenues, liste des provisions à emporter faite, protocoles vétérinaires réalisés, entraînement physique des hommes et des chiens et mise au point du véhicule de transport au top, nous voilà, début septembre dans le tunnel sous la Manche. Ouf, nous sommes passés ! Tout était bien en règle.

Traversée de l’Angleterre, verdoyante et respectueuse de la biodiversité du sud au nord, en une journée et arrivée au gîte dans les Highlands pour se reposer en vue du grand jour.

Nous avons quitté la France écrasée par la canicule. Ici crachin, brouillard, 11° à 9 heures. Nous roulons sur une piste piégeuse – heureusement nous avons fait blinder le dessous du véhicule 4X4 – au fond d’une vallée sauvage longeant une rivière à truite. Paysage de montagne immense – distances infinies sans voir les hauts cependant. Des moutons broutant en fond de vallée et des faisans sauvages aperçus.

Accueil chaleureux mais bref. On est là pour chasser. Où sont les setters ? Des griffons, watt ? Oui ce matin il n’y a que des griffons ! Nous avions décidé que nous chasserions toujours avec deux chiens chacun. Eric prend Ino et Orion, je prends Ilion et Minerve. On met les chiens dans une remorque tirée par un Land Rover qui nous amène à mi-pente. Nous voilà partis pour chasser de 10h30 à 13h. Nous essayons de rester à vue mais éloignés de 200 à 300 mètres environs nous nous perdons souvent de vue et nous sommes souvent retrouvés par Mike notre guide vigilant et son retriever.


En ce premier jour Ilion part en mode concours de couple de printemps – va-t-il tenir ? Il monte, il descend la pente en costaud ; Minerve suit d’abord puis s’installe à son tour.

Un point d’Ilion, Minerve refuse le patron et vient arrêter à côté de lui. J’ai le temps d’approcher. Deux grouses dévalent à 25 m – un coup claque, un oiseau tombe – les deux chiens sont au rapport et c’est Minerve qui remonte le ravin avec une jeune grouse.

Une longue période sans rien mais les chiens sont toujours très actifs et très grands, puis dans une forte pente en bord de torrent, arrêt des deux chiens – ça remonte très rapidement et longuement – j’ai du mal à suivre, le terrain est très difficile – blocs de granit – il faut de bonnes chevilles et des genoux solides. La compagnie longe le torrent et est bloquée par les deux chiens. Puis rapidement envol – 7 à 8 grouses – trop loin je ne peux tirer.

Retour à bon vent – je comprends que nous ferons toujours une boucle – aller à bon ou mauvais vent, retour à l’inverse. Les chiens devront s’adapter.

Deux arrêts d’Ilion sans tir possible, puis devant Minerve seule (Ilion est parti chasser avec Eric qui tire mieux que moi) une compagnie vole. La chienne veut partir, fait 10 mètres et se fige. J’ai le temps d’approcher, une grouse décolle et tombe net – rapport à la main, c’est une vieille.

Rapide pique-nique et à 14 h remontée sur une autre pente avec Noth, 24 mois, et Ossa, 15 mois. Eric a pris son pointer et son rouge. Noth arrête par surprise une compagnie qui la laisse presque indifférente puis elle fait voler une deuxième compagnie de huit oiseaux qui l’intéresse fortement. Elle veut poursuivre et se fige – une grouse est restée – je peux approcher – envol à 20 mètres – tir et rapport parfait dans la main. Nous sommes heureux et fiers dans ce décor de rêve, nous nous câlinons.

Ossa est très loin dans la pente où elle se met à l’arrêt – trop loin, impossible d’aller servir. Deux grouses s’envolent et entraînent la chienne à aller chasse avec Eric que j’entends tirer plus bas mais que je ne vois pas. Puis elle revient à moi et nous montons plus haut.

Noth se fige dans un tapis de bruyères, nez haut, arrêt de grand style – quel plaisir -. Ossa vient au patron, puis s’avance et arrête à côté de Noth. Je peux m’approcher et passer en dessous sur le côté de la pente – c’est magnifique. Quatre grouses décollent à 15 mètres des chiennes et dévalent la pente. Je laisse partir avant de lâcher un coup sur la dernière. Je la ramasse et la montre aux deux chiennes en les caressant et les félicitant car elles viennent de me faire un immense plaisir.

La nuit commence à tomber, il est 17 heures, nous remontons dans la Land Rover et nous rentrons. Ce premier jour nous rend fiers et optimistes pour la suite. Ilion et Ino seront en toujours en grande forme et au top niveau. Minerve s’affirmera, Nath, Ossa et Orion chasseront fort et n’auront peur de rien, ni de l’immensité, ni de la végétation, ni des pentes…


Le lendemain, changement de décor ! Mike notre guide à bord d’un véhicule 4X4 type militaire (un Land Rover serait totalement insuffisant) nous fait monter sur un plateau recouvert de tourbières tout en haut des montagnes. Un point de vue à couper le souffle. Le temps est sec mais le vent du nord est glacial. Ce matin je découple Lewis et Minerve. On commence à bon vent mais les chiens montent trop dans le vent, Lewis prend trop grand et dévale les pentes abruptes en bordure, un magnifique arrêt mais impossible d’approcher – une compagnie vole. Très bel arrêt de Minerve en bord de pente – la grouse vole à mon arrivée et file dans le ravin, je manque un tir très difficile…Ce matin quatre très beaux arrêts utiles pour chaque chien dont trois exceptionnels de Lewis sur compagnie… mais le tireur n’y arrive pas ! Les deux chiens se sont bien comportés, Minerve devient particulièrement meurtrière et Lewis est grandiose.

Après un léger casse-croute à l’abri du vent derrière notre véhicule c’est au tour de Noth et Ossa pour moi et de l’irlandais pour Eric.

Nous partons à contre vent, les chiens font de grandes pointes en avant et reviennent à nous en chassant. Nath et le rouge vont trop loin, ces jeunes chiens s’adaptent très rapidement à ces territoires immenses, sans fin. On doit beaucoup les rappeler à la réalité mais sans siffler pour rester discrets face à ces oiseaux toujours en éveil. Alors  je n’utilise que le vibreur pour appeler l’attention des chiens. La végétation - bruyères de différentes hauteurs, herbes hautes dans l’humidité, tourbières, trous d’eau – ne les trouble ni ne les freine. Ils avalent tout avec la même ardeur et la même vitesse. Dans cette première heure, à mauvais vent, les chiennes arrêtent mais « serrent » trop les oiseaux qui décollent avant que je puisse arriver.


On revient ensuite à bon vent, et là changement, les chiennes chassent consciencieusement. C’est beau…

Cependant Ossa ne respecte pas les arrêts de Noth et deux compagnies nous échappent ainsi… Je fais patronner Ossa au vibreur et tout s’arrange. Magnifique point de Noth, Ossa arrive et patronne, Noth coule 3 mètres, deux grouses décollent à 20 mètres, une tombe que Noth rapporte immédiatement dans ma main.

Belle journée, énormes progrès des  trois chiennes dont c’est le deuxième jour de chasse.

Les journées se suivent avec une belle constance de la pluie et du vent parfois si fort que l’on a du mal à tenir debout dans les fortes pentes. Des landes de bruyères parfois si hautes que l’on a parfois du mal à progresser à travers les rochers derrière lesquels les oiseaux se protègent du vent. Des tourbières piégeuses qui ne permettent jamais de revenir les pieds secs et enfin des bords de torrents aux pentes vertigineuses qu’hommes et chiens se doivent de traverser sans casse. De la fatigue chaque soir pour les hommes, les muscles des cuisses tirent sérieusement. Pas question d’envisager autre chose que le repos.


Il serait fastidieux de décrire dans le détail tous les parcours des chiens mais ils sont inscrits dans le carnet de notes rempli consciencieusement chaque soir. En les relisant cela me permet de revivre des scènes incroyables dans ce décor de rêve.

Tous les chiens bien entraînés tout le mois d’août n’ont eu aucun problème physique ou mental d’adaptation. Ils ont tous été énormes en fonction de leur âge.

Les grands ont toujours chassé avec beaucoup d’ambition et de justesse dans leur travail sur l’émanation – jamais d’arrêt à vide -, d’intelligence dans la recherche de l’oiseau, de respect de leur compagnon de couple même si c’était un tout jeune, de sagesse sur les arrêts même si les compagnies de grouses piètent beaucoup et n’attendent pas cinq minutes comme les bécasses quand elles sont bloquées.

Les jeunes ont évolué du jour au lendemain et ont montré leur grande passion, leur capacité à s’adapter à un environnement hostile et à une chasse à deux.

Notre guide Mike apportera sa conclusion: « Good dogs, very good points but the shooter… ». Avec ce satisfecit de Mike – une référence – pour moi le pari est gagné. Ilion, Ino, Lewis, Minerve, Noth, Orion et Ossa ont été dignes des grands chiens britanniques qui ont l’habitude de chasser sur ces terres ancestrales des Highlands. Quels grands chiens qui nous ont rendu si heureux. Merci à eux (ils appartiennent à ma famille).

Grand merci à mon ami Eric – frère de passion - et bien sûr à Hélios le pointer et Noé le rouge – frères d’aventure -, tous des valeurs sûres.

En résumé, tous de grands chiens de chasse. C’est ce que nous cherchons à obtenir dans notre élevage depuis 35 ans.

Nous reviendrons…


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